miercuri, 22 aprilie 2020

Cullmann, Pannenberg et Zizioulas

Théologiens du XXe siècle. Les trois qui sont sur le podium



Il s'agit de Cullmann, Pannenberg et Zizioulas. Les deux premiers sont protestants, le troisième est orthodoxe. Et pourtant ils figurent parmi les plus proches de la manière de voir de Benoît XVI. L'auteur de ce classement: un théologien, également non catholique, qui fait autorité


par Sandro Magister








ROME, le 16 décembre 2011 – Noël approche. Et voici que revient, avec l’Enfant déposé dans la mangeoire, cette nouvelle inouïe : le Fils unique de Dieu s’est fait homme.


C’est ce que proclame le "Credo". C’est ce que les conciles œcuméniques des premiers siècles, de Nicée à Chalcédoine, ont fixé dans le dogme.


Mais c’est également ce qui est le plus contesté, ou le plus caché, ou le plus oublié, aujourd’hui, au sein de l’Église et en dehors.


En particulier dans son livre consacré à Jésus, le pape Benoît XVI a précisément voulu défendre le Jésus vrai Dieu et vrai homme contre toutes les tentations de le réduire seulement à l’un ou seulement à l’autre, autrement dit de séparer le Jésus de l’histoire du Christ de la foi.


Dans l'immense production théologique du siècle dernier, quelles sont les personnalités qui ont donné les réponses les plus géniales à ce problème capital ?


Un livre écrit par un théologien protestant, le vaudois Fulvio Ferrario, et consacré à la théologie du XXe siècle, a été publié cette année en Italie. Il frappe non seulement par une clarté et une richesse dans l'exposition qui sont peu communes et par son efficacité narrative, mais également par le relief donné à certains grands théologiens qui sont précisément, parmi les non catholiques, les plus proches de la manière de voir et de la sensibilité du pape actuel, qui est lui aussi théologien.


Le premier est Oscar Cullmann (1902-1999), qui est né à Strasbourg, a vécu à Bâle et a été, dans les années où avait lieu le concile Vatican II, l’hôte à Rome de cette même faculté vaudoise de théologie où enseigne Ferrario.


Ferrario le classe "parmi les théologiens protestants les plus appréciés dans le monde catholique". Même s’il est moins connu qu’un Barth, un Bultmann, ou un Bonhoeffer, Cullmann a laissé une empreinte forte et durable.


C’est lui qui a créé la formule – désormais universellement utilisée – du "déjà et pas encore" pour exprimer la dialectique entre le salut déjà réalisé par Jésus-Christ et l’attente de l’accomplissement final.


Et c’est lui, surtout, qui a insisté dans chacun de ses ouvrages – depuis "Christ et le temps" jusqu’à "Christologie du Nouveau Testament" – sur la continuité entre le Jésus de l’histoire et le Christ de la foi. Cullmann était avant tout un grand exégète de la Sainte Écriture, mais il a toujours associé la recherche philologique et historique à la réflexion théologique. Et "dans la recherche de ce difficile équilibre – écrit Ferrario – il constitue un modèle, en un temps où la difficulté de communication entre les deux disciplines atteint des niveaux dangereux".


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Un deuxième grand théologien placé au tout premier plan par Ferrario est l’Allemand Wolfhart Pannenberg, luthérien, 83 ans.


Chez lui le lien entre la théologie et la philosophie est très étroit. Le Christ crucifié et ressuscité est l’événement capital – pouvant également être atteint par la science historique – qui permet de saisir le sens de l’histoire universelle de l’homme et du monde. La révélation de Dieu est de l’histoire et la perte de cet horizon est la racine de la crise de la culture contemporaine. "Il est assez facile de noter – écrit Ferrario – les convergences objectives entre cette conception et un grand nombre de thèses du magistère catholique romain".


Mais ce n’est pas tout. Les réflexions du protestant Pannenberg se rapprochent également de celles des catholiques en ce qui concerne la doctrine des sacrements et des ministères ordonnés. Ferrario souligne qu’"il considère comme non seulement possible, mais même souhaitable dans certaines conditions, que le protestantisme reconnaisse l'importance de ce que l’on appelle le 'ministère pétrinien', c’est-à-dire de la papauté".


Il en est de même dans le domaine de la théologie morale :


"L'orientation générale de la pensée de Pannenberg et sa confiance envers les possibilités théoriques d’une éthique philosophique d’origine aristotélicienne le conduisent à éprouver de forts soupçons vis-à-vis de beaucoup d’orientations des sociétés sécularisées dans le domaine moral, par exemple en matière de sexualité. Dans certaines occasions, il exprime publiquement son désaccord avec certaines prises de position, trop 'permissives' à son avis, des Églises évangéliques allemandes".


Mais cela n’empêche pas Ferrario de conclure le portrait de Pannenberg – c’est-à-dire du plus "ratzingerien" des grands théologiens protestants actuellement vivants – par cette appréciation très élogieuse :


"Dans le contexte postmoderne, la pensée de Pannenberg est marquée par une inactualité qui est fascinante et stimulante. L'appel à la rigueur et à la portée universelle de la raison critique, l'insistance sur une conception de la foi comme 'grand récit', carrément historico-universel, constituent une provocation vis-à-vis de la rhétorique d’une théologie qui voudrait se réduire à l'autobiographie du théologien. Pannenberg a en commun avec les classiques de la réflexion théologique l'idée d’une pensée intrépide, qui n’accepte pas de s’arrêter avant d’avoir rencontré la réalité de Dieu. Et c’est cette hardiesse du concept qui en fait, au-delà de toute critique, un maître".


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Une troisième personnalité est fortement mise en relief par Ferrario dans le chapitre qu’il consacre à la théologie des Églises orthodoxes : Ioannis Zizioulas, métropolite de Pergame.


Zizioulas est l’évêque-théologien qui fait le plus autorité au sein du patriarcat œcuménique de Constantinople et c’est un ami de longue date de Joseph Ratzinger. "Il développe – écrit Ferrario – l'idée de l’Église comme communauté qui naît de l'eucharistie. Et, en tant que telle, elle est, en un sens non pas théorique mais hautement réaliste, le corps terrestre du Ressuscité et une participation à la vie trinitaire".


C’est pourquoi il n’est pas étonnant que "l'ecclésiologie eucharistique de Ioannis de Pergame soit très utilisée et très appréciée dans le monde de l’œcuménisme. En effet elle est liée très organiquement et de manière élégante à l’ensemble de la vision théologique et elle permet une compréhension de l’Église d’un point de vue principalement mystico-sacramentel, à l’encontre d’une dérive juridique dont, parfois, les catholiques romains mettent en évidence au moins certaines limites". Une compréhension de l’Église à laquelle, reconnaît Ferrario, "la mentalité protestante réagit, par contre, de manière ambivalente".


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À la dernière page de son passionnant voyage dans la théologie du XXe siècle, Ferrario cite le discours prononcé à Ratisbonne par Benoît XVI, dans lequel ce dernier revendiquait un espace public pour la théologie dans les modernes universités du savoir.


Et voici comment il conclut :


"Le regard que nous portons sur l’histoire de la théologie du XXe siècle devrait avoir montré que la théologie a été 'publique' précisément lorsqu’elle a été ecclésiale : c’est-à-dire lorsqu’elle a donné une expression intellectuellement critique à la tentative d’annoncer l’évangile dans le monde qui a été faite par la communauté chrétienne. [...]


"Les méthodes exégétiques, historiques, philologiques employées par la théologie seront les mêmes que celles des sciences religieuses ou des théories du christianisme qui, déjà actuellement, l'appuient et avec lesquelles la pensée ecclésiale est appelée à dialoguer sereinement.


"Mais la théologie chrétienne s’obstine à penser que c’est une autre mission qui lui a été confiée par son Seigneur : celle de contribuer, par la réflexion, au ministère de l’Église, c’est-à-dire à la prédication de la mort et de la résurrection de Jésus-Christ, dans l’attente de sa venue".


Cette sentence limpide du théologien protestant italien faisant le plus autorité dit leur fait aux nombreux faux théologiens qui occupent aujourd’hui le devant de la scène et veulent "humaniser" Jésus au lieu de l’annoncer comme vrai Dieu et vrai homme.


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Le livre :



L'auteur est professeur de dogmatique et de disciplines connexes à la Faculté Vaudoise de Théologie de Rome et professeur invité à l'Institut d’Études Œcuméniques Saint-Bernardin de Venise. Il dirige "Protestantesimo", la revue de théologie de la Faculté Vaudoise.
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Théologies et théologiens du XXe siècle
https://www.museeprotestant.org/parcours/theologie-et-theologiens-du-xxe-siecle/
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Karl Barth: https://www.jacques-ellul.org/influences/karl-barth

Karl Barth (w.fr.) https://fr.wikipedia.org/wiki/Karl_Barth

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